L’Île de Gorée au Sénégal est un lieu symbolique et incontournable. Située au large de la capitale sénégalaise Dakar, à une vingtaine de minutes de bateau dans l’Océan Atlantique, l’île est l’un des bastions historiques de la traite négrière en Afrique. Les stigmates de cette dernière se font sentir partout sur l’île. Ses monuments, son architecture et son atmosphère nous plongent instantanément dans son passé colonial, où le commerce des esclaves représentait le pilier fondamental de l’économie de l’île. Gorée revêt une grande importance historique et culturelle. C’est pour cela d’ailleurs qu’elle a été l’un des premiers lieux à entrer dans le patrimoine mondial de l’UNESCO, en 1978.
Rattachée à Dakar et pourtant semblant dans un autre monde, elle crée un décalage avec le tumulte de la capitale. Gorée attire de nombreux touristes qui s’y perdent dans ses rues colorées.
Dans cet article, nous allons partir à la découverte de cet endroit hors du commun et du temps, mondialement connu. Entre héritage historique et culturel d’un côté, tourisme et vie quotidienne de l’autre, vous allez tout savoir sur l’Île de Gorée au Sénégal, étape incontournable de votre voyage au Pays de la Teranga.
Histoire de l’île de Gorée au Sénégal
Origines de l’île de Gorée
L’Île de Gorée se trouve à 3,5 kilomètres de la Presqu’île du Cap Vert. Elle est en réalité d’origine volcanique puisque sa constitution est principalement de lave solide. Ses 28 hectares renferment une grande biodiversité aujourd’hui menacée par l’érosion et le tourisme de masse. Mais nous y reviendrons plus tard.
L’Île de Gorée fut découverte par les portugais en 1444. Les documents administratifs de l’époque révèlent que l’île fut baptisé « Palma » par le commandant Dinis Dias. Les populations locales l’appelaient quant à elles « Ber« .
Historiquement, le nom actuel de l’île a été donnée par les marins hollandais qui la baptisèrent ”Goede reede” (littéralement traduit par « Bonne rade »), lorsqu’ils en prirent le contrôle en 1588. Avec le temps, elle a été renommée « Gorée ».
C’est Louis XIV qui la confisqua en 1677 grâce au vice-amiral d’Estrées. En 1785, le gouverneur de l’époque De Boufflers étant amoureux de l’Île de Gorée, il y fit transférer ses quartiers de résidences (Fort d’Estrées).
Longtemps spectatrice de conflits entre anglais et français pour son occupation, elle passa définitivement sous pavillon tricolore en 1817 jusqu’à la décolonisation du Sénégal en 1960. Il est d’ailleurs à noter qu’avec Saint-Louis, Gorée est la première ville d’Afrique de l’Ouest construite sur le modèle occidental. L’architecture des bâtiments, intacte encore aujourd’hui, ne laissent aucune place au doute quant à l’occupation européenne de l’ïle.
L’Île de Gorée pendant la traite négrière
L’Île de Gorée au Sénégal est mondialement connue pour sa destinée étroitement liée avec l’esclavage. Cette traite négrière s’est étendue du XVème au XIX ème siècle sur l’île, faisant de Gorée l’un des plus importants points de concentration de ce commerce, tout du moins symboliquement. En effet, le centre névralgique de la traite esclavagiste de Sénégambie se situait surtout à Saint-Louis, épicentre du marché triangulaire entre l’Afrique, l’Europe et l’Amérique.
Néanmoins, l’Île de Gorée a été le terrain d’un trafic humain très important. On ne sait pas exactement le nombre d’africains qui ont été déportés depuis Gorée par les esclavagistes durant la période, bien que le chiffre de 30 000 soit admis par beaucoup d’historiens. Cela représente en tout 10 % du commerce total de Sénégambie. Il s’agissait majoritairement de Sérères et de Wolofs.
Les esclaves, originaires de toute la région, étaient capturés et emprisonnés dans les cellules des esclaveries de l’île. En attendant d’être déportés en Amérique, ils étaient souvent employés à réaliser des tâches extrêmement pénibles pour le compte des élites. Cependant, certains captifs et notamment les femmes, n’étaient pas destinés à être transférés loin de leurs racines. Elles restaient sur place et devenaient des travailleuses domestiques.
L’Île de Gorée a également la particularité d’avoir vu s’installer une société mixte entre locaux et français. Les signares, compagnes noires ou métisses de français, jouaient un rôle prépondérant dans la traite négrière puisqu’elles étaient les propriétaires d’esclaves. Elles lancèrent entre autres, à l’instar d’Anna Colas Pépin, le commerce d’arachide au Sénégal à partir de Rufisque, peu de temps avant la fin de l’esclavagisme.
Abolition de l’esclavage
Au lendemain de l’abolition de l’esclavage en 1848, l’Île de Gorée, jusque là au centre d’un commerce triangulaire, entra dans une période de difficultés économiques, sociales et sanitaires. En effet, la traite négrière transatlantique représentant jusque là l’activité principale de l’île, cette dernière tomba dans une certaine déliquescence. En outre, la surpopulation amena les autorités de l’époque à déplacer l’activité économique et décisionnelle au Plateau en 1857. C’est donc le commencement de Dakar et ses premiers bâtiments coloniaux, toujours présent aujourd’hui.
Peu à peu, l’Île de Gorée perd de sa superbe, mais aussi de sa population. Elle est progressivement détachée administrativement du reste de Dakar. Autrefois capitale ouest-africaine, elle devient une île déchue.
La renaissance viendra dans les années 1970 où Gorée retrouvera une certaine splendeur avec la réhabilitation d’un bon nombre d’édifices d’époque. De surcroît, sa classification au patrimoine de l’UNESCO en 1978 (qui lui donnera l’attribut « d’île mémoire« ) viendra lui donner un sérieux attrait touristique. Elle s’imposera de plus en plus comme une étape obligatoire pour les visiteurs du Sénégal en tout genre !
Visite de l’Île de Gorée
Principaux sites à visiter
- La Maison des Esclaves : C’est l’étape incontournable et très bouleversante de la visite. Ses couleurs chatoyantes et son architecture viennent créer un décalage saisissant quand on connaît la fonction du bâtiment à l’époque. Cette maison, typiquement coloniale, est constitué de 2 niveaux. Les colons commerçaient à l’étage et le rez-de-chaussée était quant à lui constitué de cellules. Ces dernières enfermaient les esclaves selon leurs caractéristiques avant d’être envoyés à leurs acquéreurs via un navire négrier qui les emmenait vers les ports d’Amérique ou d’Europe. Ainsi, c’est avec un certaine stupeur et une prise de conscience quasi immédiate de l’horreur de l’époque que l’on découvre les différentes geôles pour hommes, femmes, jeunes filles, enfants, récalcitrants ou inaptes. La porte de non retour laisse découvrir l’horizon de l’Océan Atlantique. Elle symbolisait le dernier voyage pour les esclaves de la maison, en route loin de leurs attaches. L’impact et l’émotion sont immenses.
- Statue de la Libération des Esclaves : Elle se trouve juste à côté de la Maison des Esclaves. Elle y représente 2 Africains désormais libérés de leurs chaînes, les bras tendus vers le ciel en s’enlaçant. L’esclave est désormais un homme libre.
- Le Fort d’Estrées : Il est situé tout au nord de l’Île de Gorée et a été construit par les français en 1856. Il s’agissait d’une citadelle sans grande originalité. Le Fort abrite aujourd’hui le Musée Historique du Sénégal. On y trouve en son sein 500 pièces réparties en 12 salles, présentant l’histoire du Sénégal de l’époque paléolithique à contemporaine. Les thèmes abordés incluent la préhistoire, les grandes dynasties et royaumes du Moyen Âge, la traite négrière, les mouvements de résistance, la religion musulmane, ainsi que les événements plus récents de la colonisation et de la décolonisation.
- Ballade dans les rues de Gorée : Ses rues, malgré le passé tragique de l’île, sont une invitation à la douceur et au calme. Il n’y a pas de voitures qui circulent dans l’Île de Gorée. Les déplacements se font à pieds. Les petites rues fleuries et les bâtiments colorés de l’époque coloniale instaurent un vrai contraste avec Dakar.
- Mais aussi : L’Eglise Saint-Charles Borrome, le Mémorial du Castel, le Musée de la Femme Henriette-Bathily, la Mosquée de Gorée, le Palais du Gouverneur, le Canon de Navaronnes ou encore le Quai des Boucaniers.
Une visite indispensable pour la compréhension de l’Île de Gorée
Il faut visiter les lieux pour réellement ressentir le poids historique de l’Île de Gorée au Sénégal. En effet, elle représente parfaitement à elle seule la traite négrière qui s’est étendue à toute l’Afrique de l’Ouest pendant des siècles. Bien qu’elle n’ait pas été l’actrice « majeure » de la traite Atlantique, elle renferme des symboles hautement représentatifs de toute une époque qui nous renvoient à une horreur sans nom.
Elle est devenue depuis les années 1970 une place majeure du tourisme mémoriel. Les bâtiments précédemment cités sont accessibles au public. Les guides y assurent leur visite avec tout un complément d’informations historiques. Gorée nous rappelle à chaque rue, chaque bâtiment et chaque inscription que cette époque n’est pas si lointaine. La visite de la Maison des Esclaves fait office d’électrochoc quand on s’arrête un instant devant ses minuscules cellules.
L’Île de Gorée est une invitation à la réflexion sur l’être humain, sans œillère ni faux-semblant. Elle est la mémoire des Droits de l’Homme et l’un des berceaux du pardon.
L’importance du tourisme dans l’économie locale
1300 habitants composent l’Île de Gorée au Sénégal aujourd’hui. Autrefois régie par la pêche, l’économie actuelle repose essentiellement sur le tourisme. Elle est depuis une cinquantaine d’année l’un des fers de lance de l’attractivité touristique du Sénégal.
L’île a su profiter de son histoire et de son patrimoine culturel pour attirer les visiteurs du monde entier et d’en faire un lieu hautement symbolique. Il est d’ailleurs très courant que des personnalités du monde entier y fassent une halte.
Pour les habitants, l’afflux massif de touristes a crée un bon nombre d’activités générant des revenus. Les restaurants et les hôtels accueillent les touristes pour un repas ou une nuit sur place. Des marchands d’objets de tout genre proposent leurs produits dans des boutiques à ciel ouvert. Des personnes proposent leurs services pour vous assurer la visite de l’île en vous présentant ses différents lieux clés et les informations pratiques.
Conseils pratiques pour la visite de l’Île de Gorée
Comment s’y rendre ?
On se rend sur l’Île via les Chaloupes de Gorée, pour un trajet de 20 minutes sur la Liaison Maritime Dakar-Gorée (LMDG). On l’emprunte directement au Port Autonome de Dakar. La navette est assurée 12 fois par jour (allers-retours) et il n’y a pas besoin de réserver puisque vous pouvez prendre vos billets directement sur place. Voici les horaires ci-dessous :
Voici également les tarifs par aller-retour en Francs CFA :
Où manger et se loger ?
Vous trouverez bon nombre de petits restaurants atypiques à Gorée où vous pourrez manger des spécialités locales. En voici quelques un :
- Chez Poulot
- Saint-Germain
- Chez Thio
- Chez Tonton
- Chez Kiki
- Le Fassy
- Le Boucanier
- …
De plus, si vous désirez rester plusieurs jours, de charmants petits hôtels et chambres d’hôtes vous accueillent pour passer la nuit sur l’Île de Gorée au Sénégal. C’est d’ailleurs l’occasion d’assister à de merveilleux levers et couchers de soleil sur la plage. Vous y passerez des moments de grande authenticité en famille ou entre amis. Voici une petite liste des établissements d’hébergement que vous pourrez trouver sur place :
- Maison Augustin Ly
- La Maison du Marin
- Chez Eric
- Chez Coumbis
- Hôtel Madou Gorée
- Hôtel Municipal la Porte du Retour
- …
Activités culturelles et évènements à Gorée
L’Île de Gorée accueille tout au long de l’année plusieurs manifestations culturelles qui valent le détour. Parmi celles ci :
- Gorée Cinéma : Il s’agit d’un festival qui a pour but la promotion du cinéma africain. Les films sont projetés sur la plage de l’île, juste à côté de l’embarcadère. Les habitants comme les touristes profitent des films d’époques ou de productions modernes sur un grand écran venant illuminer cet évènement nocturne. N’hésitez pas à y aller, vous y passerez un très bon moment ! Visitez le site web.
- Regards sur Cours : Une année sur deux, Regards sur Cours organise une promenade artistique et privilégiée à Gorée. Pendant le long week-end de la Pentecôte, les visiteurs peuvent entrer dans les demeures colorées, les patios, et les jardins parfumés qui s’ouvrent à eux. En plus de l’architecture remarquable des maisons coloniales, les touristes et les résidents de Dakar ont la chance de découvrir des expositions d’artistes locaux installées dans les espaces intérieurs. Cette occasion unique permet de redécouvrir l’île historique et d’apprécier les œuvres d’art présentées avec un regard neuf.
- Traversée Dakar-Gorée : Il s’agit d’une course de natation reliant la capitale avec l’île. C’est une épreuve ouverte à tout le monde, où les nageurs rallient la plage de Gorée.
- Gorée Diaspora Festival : C’est un autre évènement majeur de l’Île de Gorée. Axée autour de la solidarité entre peuples africains et leurs diasporas à travers le monde, l’évènement attire chaque année bon nombre d’artistes et de personnalités de tout bord.
C’est donc la fin de notre échappée sur l’Île de Gorée au Sénégal. Véritable temple de la réconciliation et des Droits de l’Homme, il s’agit d’un des lieux les plus chargés en émotions du Sénégal. Il nous invite à une réflexion humble sur l’histoire et sur toutes les facettes de l’humanité. Rien que pour cela, cela en vaut le détour !
L’érosion et la fragilité des bâtiments menacent la pérennité de l’île. Un premier mouvement pour la préservation de Gorée est né en 2016, avec le déblocage de plusieurs fonds étrangers afin de financer les travaux essentiels à la pérennisation des lieux.
Dernièrement, l’UNESCO a annoncé sa volonté de prioriser la restauration des édifices historiques de l’île, car certains d’entre eux sont menacés de s’écrouler à court terme s’ils ne sont pas restaurés. Courant l’année 2023, un groupe d’experts sera envoyé sur place pour évaluer minutieusement les besoins en étroite collaboration avec les autorités sénégalaises. En fonction des résultats obtenus lors de cette mission, l’UNESCO travaillera en collaboration avec le Sénégal pour mettre en place de nouvelles mesures de conservation. L’organisation soutiendra également le pays dans ses efforts pour trouver des financements auprès de la communauté internationale.
RDV sur KEUR-IMMO.com.